Après cinq années de gérance, dont trois avec Séverine Romanowski, Simon Sarazin a transmis ses fonctions lors d’une élection sans candidature en juin 2022. Le temps de faire une transition avec la nouvelle co-gérance, nous le retrouvons quelques mois après pour une interview de fin de mandat. L’occasion de faire un bilan de ses fonctions de gérance, de partager ses réussites, ses difficultés, mais aussi de se projeter vers l’avenir.
D’un point de vue personnel, quel bilan tires-tu de cette expérience de co-gérance ?
Pendant cinq ans, j’ai appris à gérer une structure. Ça donne une forme de légitimité, un sentiment personnel de se dire que « Oui j’ai le droit, et c’est pas si compliqué que ça de gérer des entreprises ». C’est faisable. Ça me donne des envies pour la suite, continuer à apporter ce que je peux dans les CAEs, mais depuis le nouveau territoire où je suis installé, et plus en lien avec d’autres enjeux, comme les tiers-lieux, les plateformes coopératives, les communs. J’en retiens également le côté aventure humaine. J’ai fais de belles rencontres, lié des amitiés. Aussi, grâce à la co-gérance, j’ai réussi à faire avancer pas mal de questions sur lesquelles j’étais engagé. C’est le cas notamment de la question des rétributions (système où un budget commun est partagé entre plusieurs personnes et réparti selon une fourchette horaire et les besoins de chacun·es) qu’on a réussi à explorer et dont j’impulse l’utilisation dans d’autres collectifs.
Si tu regardes du côté d’Optéos maintenant, quel est le bilan pour la structure de ta présence à la gérance ?
J’ai un peu l’impression d’avoir fait de l’assemblage de compétences, d’avoir réussi à faire que des personnes qui ont des expertises variées dans la structure puissent les mettre à profit du collectif. C’était le rôle que je préférai. Sinon, j’avais le rôle un peu ingrat de résoudre plein de petites choses, de ramasser les galères qui tombent, des trucs qui traînaient de l’époque difficile de la coopérative, et toutes les choses qu’on arrive pas à déléguer comme la gestion des paiements, les suivis des subventions. L’arrivée récente d’un Responsable des process administratifs et financiers devrait soulager la co-gérance.
Mais là où j’ai été le plus utile je pense, c’est dans mon rôle d’explorateur. Normalement, pour gérer une entreprise ou une coopérative, mieux vaut prendre un profil gestionnaire. Là, on m’a permis de porter des explorations, de trouver de nouvelles manières de faire, et ça, je crois que ça a permis à Optéos de se trouver son modèle si particulier. Aujourd’hui, il y a toujours des explorations, mais la coopérative entre dans une phase de stabilisation.
Quel regard portes-tu sur la co-gérance à 3, émanation de la pré-AG et validé lors de la dernière AG ?
Vu que la structure a grandi et qu’il y a beaucoup de problématiques qui arrivent à la cogérance que nous n’arrivons pas à traiter dans d’autres espaces, je pense qu’à trois c’est pas mal, ça permet de répartir les rôles. Même si des fois on aimerait l’éviter, il y a quand même le coté responsabilité qui s’impose à nous dès que l’on a le statut de co-gérant. Être deux à trois personnes à porter cette vigilance est une bonne chose. Ce serait intéressant de réussir à éviter ce coté là, mais on sent de suite ce changement de posture pour les nouvelles personnes qui arrivent en co-gérance. Même moi, ça me rassure qu’elles prennent le lead, même si ça peut entrer en tension avec les enjeux d’une gouvernance partagée. C’est tout un équilibre à trouver.
Envie de dire quelques mots à la nouvelle équipe de co-gérants (Séverine R., Benjamin D. et Christian D) ?
Je souhaite que tous les trois arrivent à ne pas récupérer trop de sujets sur lesquels finalement aucune n’est vraiment à l’aise ou pas vraiment dans leur domaine. C’est un petit peu ce qui m’a manqué dans Optéos. À un moment donné je faisais beaucoup de choses parce qu’il fallait les faire et pas parce que j’aimais les faire. Je leur souhaite de réussir à garder l’équilibre. Je leur souhaite aussi de réussir à garder le côté ouvert et innovant de la CAE (Coopérative d’Activité et d’Emploi), d’une CAE qui reste vivante, de faire que cette fonction de gérant puisse évoluer au fur et à mesure du développement de la coopérative. On sait pas encore bien ce que c’est cette gérance, elle se structure encore.
Chez Optéos, les personnes qui gèrent la structure sont des entrepreneures-salariées. C’est ton cas. Quel a été l’impact de la fonction de co-gérant sur le développement de ton activité ?
L’impact a été très fort la première année parce qu’il n’y avait pas de budget pour s’impliquer. Ça a pas mal pesé dans mon activité. Toutefois, c’était un moment où j’avais d’autres prestations qui me rémunéraient suffisamment et j’avais envie d’aller vers d’autres modes de rémunération comme la contribution. Ça été l’occasion d’explorer le modèle de budget contributif au sein d’Optéos. Finalement, l’équilibre s’est fait une fois qu’un budget contributif a été mis en place.
Et sachant que ce que j’ai exploré avec Optéos (coopération, outils numériques comme le Rocket Chat et le Wiki) est lié à mon domaine d’activité, j’ai beaucoup progressé. Je n’ai donc pas eu l’impression de trop m’éloigner sauf sur la partie de gestion des problèmes, de l’admin comptable ou RH. Je l’ai fait le temps de trouver des personnes capables de s’impliquer sur ces sujets, mais c’était plus difficile et ça prenait du temps sur mon activité.
Et la suite ? Ça se passe comment pour toi ?
Je continue mon activité d’entrepreneur comme avant. Maintenant, je peux me concentrer sur ce que j’aime faire : faciliter la coopération à l’échelle des CAE (Coopérative d’Activité et d’Emploi), entre CAE. À mon sens, c’est un des leviers de développement de nos propres activités. Là, je vais peut-être travailler sur la structuration d’une coopérative pour faire du développement de projets entre acteurs des CAE et des tiers-lieux (par exemple pour porter des projet comme KPA-Cité). Je vais essayer de développer mon activité sur des sujets comme le monde du vélo ou la facilitation ou tout ce qui va être accompagnement des collectivités sur les sujets de tiers-lieux, de démocratie. Je suis toujours coordinateur dans le projet Kpa-Cité et membre de la fédération des CAE. Là où j’habite, près de Montreuil-sur-Mer, j’aimerais bien développer ces sujets, peut-être aussi soutenir un réseau d’entrepreneurs en CAE et des lieux pour faciliter le type d’activité que l’on a chez Optéos. Je suis toujours autant occupé, et ce n’est pas prêt de s’arrêter !
Pour remercier Simon de ces quelques années passées à la co-gérance, les membres de la coopérative lui ont offert un vélo électrique pour arpenter sa belle région, et pourquoi pas nous rejoindre à Lille lors d’une prochaine Journée Optéos !
Pour aller plus loin :
Pour comprendre le fonctionnement d’une élection sans candidature, (re)découvrez un article d’Eric Favre sur Interpole : Une élection sans candidat chez Optéos
Pour (re)découvrir le projet KpaCité, c’est par ici : KPA-Cité : porter l’entrepreneuriat coopératif dans les quartiers prioritaires
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